• L'AFFAIRE RANUCCI

    L'AFFAIRE RANUCCI

    Marie-Dolorès, 8 ans est enlevée devant chez elle, le 3 juin 1974 à Marseille, alors qu'elle joue avec son petit frère Jean. Un homme ayant abordé les deux enfants en leur faisant croire qu'il cherchait son chien perdu parvient à faire monter la petite fille à bord de son véhicule, identifié comme étant une Simca 1100 par un garagiste témoin de la scène.

    Quelques heures plus tard, Christian Ranucci est impliqué dans un accident de la circulation à bord de sa Peugeot 304 coupé, aux alentours de Marseille, accident à la suite duquel il prend la fuite. Les époux Aubert arrivent sur les lieux et le poursuivent pour relever le numéro d'immatriculation de la 304 coupé, ils diront avoir aperçu un personnage descendre de la voiture, non loin d'une champignonnière, chargé d'un « paquet assez volumineux » selon leurs premières déclarations notées au téléphone par les services de gendarmerie. Leurs premières déclarations concernaient un simple délit de fuite d'un chauffard qui n'avait causé qu'un accident matériel.

    Un rapprochement est ensuite fait entre l'homme et l'affaire de la petite disparue. Plusieurs battues de gendarmerie seront effectuées avant de retrouver le corps de la fillette à proximité (contredite par les dépositions signées des époux Aubert) de l'endroit où les Aubert ont vu la voiture de Ranucci arrêtée. Christian Ranucci reconnaitra les lieux au cours de la reconstitution.

    Un pull-over rouge sera retrouvé dans la gallerie d'une champignonnière, où Ranucci s'était caché pendant plusieurs heures, lors d'une fouille par les gendarmes. Or, un homme avec un pull-over rouge aurait eu des gestes obscènes envers une petite fille quelques jours plus tôt, cet homme n'a pas été reconnu comme étant Christian Ranucci et n'a jamais été identifié.

    Le 5 juin, Christian Ranucci est interpellé à son domicile et placé en garde à vue, il passera aux aveux 17 heures plus tard. Il sera, ensuite, immédiatement déféré devant la juge d'instruction à qui il réitérera ses aveux à l'occasion de sa première comparution. Il désignera l'endroit exact où est dissimulé son couteau (qui n'a pas été reconnu comme arme du crime). Pourtant ce couteau ne sera retrouvé, par les gendarmes utilisant un détecteur à métaux, qu'après 1h55 de recherches, dans un immense tas de fumier.

    Quelques éléments, qualifiés de troublants par les défenseurs de Ranucci, apparaissent cependant dans l'affaire :

    le frère de la victime (âgé de 6 ans) ne le reconnaît pas comme étant « l'homme au chien perdu », le garagiste non plus, tout comme sa voiture qui ne correspond pas au modèle décrit précédemment mais qui lui ressemble fortement (la Simca 1100 décrite par le garagiste), et le frère ne reconnaît pas la Peugeot 304 coupé appartenant à Christian Ranucci comme étant la voiture avec laquelle est arrivé l'homme qui a enlevé sa sœur, mais il dit avoir vu une Simca Chrysler ;
    le pull, trop grand pour Ranucci, ne semble pas lui appartenir, de plus sa mère a indiqué aux policiers que Christian détestait le rouge, chose contreversée car certes car après la fouille du domicile de Christian Ranucci, aucun vêtement de couleur rouge ne fut retrouvé, mais les sièges de sa Peugeot étaient rouges vifs ;
    les époux Aubert n'ont eu cesse de modifier leur témoignage. Selon ces témoignages, il serait au départ question d'un homme prenant la fuite avec « paquet assez volumineux » jusqu'à ce que ce «paquet assez volumineux » ne se transforme en enfant parlant d'une « voix fluette » ; Les époux Aubert affirment avoir toujours parler d'un enfant ;
    Gilles Perrault, dans son livre Le Pull-over rouge, conteste la découverte du couteau : « Les recherches vont durer une heure cinquante-cinq. Presque deux heures pour découvrir le couteau dans un tas de fumier avec une « poêle à frire » exactement réglée […] Ce qui demeure certain, quant au couteau, ce sont les extravagantes conditions dans lesquelles on l’a découvert, les deux heures passées à retrouver un objet dont on prétend savoir qu’il est enfoui dans un tas de fumier de quelques mètres carrés… » « Détail tout à fait surprenant : le 6 juin à cinq heures et demie de l’après-midi, c’est-à-dire à l’heure exacte où commencent les recherches, l’inspecteur Porte mentionne par procès-verbal la réception d’un « couteau à cran d’arrêt de marque Virginia-Inox, à ouverture automatique, manche nacre » saisi par la brigade de gendarmerie de Gréasque le 5 juin, c’est-à-dire la veille ! »
    -Le tas de fumier est en fait immense, de plus il est truffé d'objets métaliques en tout genre (boites de conserves ...).

    -Christian Ranucci localisera au cours de la reconstitution l'endroit précis où se trouvait le couteau ensanglanté et persistera tout au long de l'instruction à déclarer en être le propriétaire. Il ne présentera aucun alibi au moment des faits.

    -Par la suite, alors que le suspect est en prison, une femme témoigne du fait que ses enfants ont été abordés dans la rue par un homme prétendant chercher un chien et correspondant physiquement à l'individu reconnu par le frère de la victime. Mais ce témoignage sera mis en cause lors du procès car le seul procès-verbal qui en existe est postérieur à une rencontre entre ce témoin et la mère de Ranucci.

    Le 9 mars 1976, s'ouvre le procès de Ranucci à la cour d'assises d'Aix-en-Provence. Celui-ci est très médiatisé et engendre une polémique importante : une frange non négligeable de l'opinion publique, troublée par le récent assassinat du petit Philippe Bertrand par Patrick Henry et son arrestation le 17 février de la même année, réclame la mise à mort de Christian Ranucci.

    En raison notamment de ses déclarations embrouillées, notamment celles sur son couteau, de son pantalon taché de sang, de l'existence d'un mobile psychologique et de son comportement agressif et aberrant à l'audience, il sera déclaré coupable et condamné à la peine capitale.

    Le 17 juillet 1976, la cour de cassation rejette le pourvoi en cassation formé par les avocats du condamné.

    Le 27 juillet 1976, le président de la République Valéry Giscard d'Estaing refuse sa grâce.

    Le 28 juillet 1976. Christian Ranucci est guillotiné. Ses dernières paroles destinées à ses avocats auraient été : « Réhabilitez-moi. ». Aucun autre témoin de l'éxécution ne les a entendu, il était blème et n'aurait plus dit un mot après son "négatif" à l'intention de l'aumonier, selon tous les autres témoins.

    Christian Ranucci était-il vraiment coupable ? Trente ans après, malgré ou à cause du plaidoyer en sa faveur de Gilles Perrault, certaines personnes doutent toujours de sa culpabilité, d'autres en restent convaincues. Son dossier a abouti à une profonde remise en cause de la peine de mort en France

    Dans son discours plaidant pour l'abolition de la peine de mort du 17 septembre 1981, le Garde des Sceaux Robert Badinter mentionne Christian Ranucci en ces termes : « Christian Ranucci : je n’aurais garde d’insister, il y a trop d’interrogations qui se lèvent à son sujet, et ces seules interrogations suffisent pour toute conscience éprise de justice, à condamner la peine de mort.


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