• Origines de la Mafia aux États-Unis

    Origines de la Mafia aux États-Unis
    <div-container></div-container> <div-container></div-container> <div-container></div-container> <div-container></div-container>L'existence de gangs plus ou moins organisés est avérée aux États-Unis depuis le début du XIXe siècle et leurs liens avec l'immigration est, comme pour de nombreux éléments sociaux en ce pays, essentielle. L'identité d'un gang est à la fois territoriale (un quartier) et ethnique. Les immigrés récents étaient à la fois protégés et le plus souvent exploités par des compatriotes installés depuis plus longtemps tandis que les Américains de souche (WASP) rejetaient ces immigrants, pauvres, non-anglophones et aux coutumes considérées comme "barbares". Regroupés dans les quartiers les plus miséreux, ils tombaient plus facilement sous la coupe de ces gangs, qui embrigadaient leurs enfants peu désireux de devoir se contenter, comme leurs aînés, des emplois les plus ingrats. Ceux-ci, apprenaient très tôt les leçons de la rue,il en tirèrent de la ruse et une grande dureté. Par ailleurs, l'essor économique et démographique rapide des États-Unis au cours du XIXe siècle offrait de nombreuses occasions de trafic ; et l'étendue du territoire et des libertés offraient une plus grande marge de manœuvre et de meilleures espoirs de gain que le Vieux continent. En ce sens, on peut considérer que l'essor du crime organisé aux États-Unis est indissociable de la construction de l'American dream.

    Au début du XXe siècle, les plus importants de ces gangs opéraient dans les grandes villes telles que Chicago, La Nouvelle-Orléans et surtout New York. Ils étaient essentiellement composés d'immigrés ou fils d'immigrés italiens, irlandais ou juifs ashkénazes (d'Europe centrale ou orientale). Cependant un gang est, selon la classification de la criminologie, une organisation de rang inférieur à celle d'une mafia, avec des activités plus réduites, des liens entre membres moins solides et une pérennité dépendant surtout de la personnalité du meneur.


    La Nouvelle-Orléans

    Les vagues d'immigrants italiens, succédant à celles des anglo-écossais et contemporaines de celles des allemands, des irlandais et des scandinaves, débutèrent dès le milieu du XIXe siècle. Les Siciliens furent particulièrement nombreux dans l'État de Louisiane, une région traditionellement rétive vis-à-vis des institutions centrales (du fait de la colonisation française au XVIIIe siècle), de corruption endémique, et parsemée de bayous, marécages habités par les Cajuns et riches de nombreuses cachettes.

    Parmi ces Siciliens, certains étaient déjà affiliés à la Cosa Nostra et renouèrent, sur le sol américain, le même type de liens que ceux prévalant en Sicile. Dédaignés par les natives franco-anglais bien établis, ils ne tardèrent en effet pas à s'organiser en bandes et il est communément admis, bien que ce soit difficile à prouver, que ce fut à La Nouvelle-Orléans que la Mafia sicilienne s'implanta pour la première fois aux États-Unis, avant d'essaimer dans les autres grandes villes à la fin du XIXe siècle. La presse locale faisait état, dès 1869, de l'agissement de bandits, cambrioleurs ou faux-monnayeurs siciliens. Entre 1870 et 1890, la police de La Nouvelle-Orléans imputa plus d'une centaine de meurtres à la Mafia sicilienne. À la fin du XIXe siècle, celle-ci dominait les activités du port (rackettant les navires en transit) et le commerce des fruits et légumes, sous la férule des frères Matranga.

    Les ressentiments xénophobes anti-italiens s'avivèrent avec le développement du crime organisé sicilien, ce qui aboutit, en 1891, à l'un des lynchages les plus sanglants de l'histoire des États-Unis. Onze Italiens furent tués par une foule en colère, suite à l'assassinat non résolu du chef de la police, David Hennessey. Toutefois la communauté italienne était la première victime de la Mafia sicilienne dont certains membres pratiquaient l'extorsion à l'encontre de leurs compatriotes par des opérations connues sous le nom de la Mano Nera, dénomination rappelant la main noire dessinée sur les lettres de menaces adressées aux cibles du racket. Si la somme demandée n'était pas laissée sur le pas de la porte de la victime, celle-ci avait de grandes chances d'être assassinée.


    New York

    Dès les années 1820, une zone au sud de Manhattan appelée Five Points (car cinq rues s'y rejoignaient), devint l'endroit le plus mal famé de New York, par sa concentration de repaires de brigands, de coupes-gorges et de maisons de passe. Au cours du XIXe siècle, les quartiers environnants étaient un assemblage de taudis reliés par des rues boueuses dans lesquels les enfants d'immigrés, au lieu de rester dans des appartements trop exigus, apprenaient la loi de la rue. Cet endroit compose le décor (à la sauce hollywoodienne) du film de Martin Scorsese, Gangs of New York, qui représente certains des gangs dominant Manhattan dans les années 1850 et 1860, tels que les Plug Uglies, les Roach Guards, les Dead Rabbits ou les Whyos, ces deux derniers étant majoritairement irlandais.

    À partir des années 1870, les immigrants juifs et italiens arrivèrent en masse à New York et s'installèrent au sud de Manhattan, en particulier à Mulberry Street, qui devint plus tard le cœur du quartier italien appelé Little Italy, dans le Lower East Side. La physionomie des gangs se modifia en conséquence, les immigrés formant leurs propres gangs pour résister à ceux qui tenaient la place. Parallèlement, la Mafia sicilienne s'installa vers les années 1890, avec l'arrivée du parrain Antonio Morello. Il s'associa avec un Sicilien immigré en 1898, Ignazio Saietta, surnommé Lupo le Loup pour sa cruauté dans la pratique de l'extorsion envers ses concitoyens. On le soupçonna d'une soixantaine d'affaires de meurtres commis par la torture (souvent par la brûlure). La famille Morello devint le groupe criminel dominant dans les années 1910.


    Broadway en 1909.Entre temps, au tournant du siècle, le gang de Monk Eastman (un juif massif et bardé de cicatrices né Edward Osterman en 1873 à Brooklyn) se disputait le territoire du Lower East Side avec un gang majoritairement composé d'Italiens connu sous le nom de Five Points Gang, création de Paul Kelly (un ancien boxeur très cultivé né Paolo Antonio Vaccarelli en 1875 en Sicile). Chaque gang comptait alors plus d'un millier de gangsters qui tiraient leurs revenus du jeu, de la prostitution, du pick-pocketing, du cambriolage ou de l'assassinat commandité. Ils étaient également en affaire avec les hommes politiques de Tammany Hall, l'organisation du Parti Démocrate à New York (au pouvoir dans la ville depuis les années 1850), pour bourrer les urnes lors des élections ou prêter main forte pour influencer une décision. En contrepartie les politiciens faisaient jouer leurs relations dans les milieux judiciaires afin de réduire les effets des arrestations. La lutte entre le Monk Eastman's Gang et le Five Points Gang culmina en 1903 avec une véritable bataille rangée en pleine rue, que la police eut le plus grand mal à contenir.

    Les règnes de ces gangs déclinèrent au cours des années 1910, notamment suite à plusieurs arrestations, en particulier celle de Monk Eastman. Le Five Points Gang a fait la transition entre les gangs du XIXe siècle et les organisations criminelles contemporaines nées de la Prohibition. De ses rangs furent notamment issus Johnny Torrio, Al Capone et Lucky Luciano. Quant à Monk Eastman (qui fut abattu en 1920 après être revenu de la guerre de 14-18), il avait parrainé la carrière d'Arnold Rothstein, grand joueur professionnel, ami des politiciens et financier de la pègre.

    Un capitaine de police corrompu nommé Charles Becker, essaya, au début des années 1910, de reprendre à son compte les méthodes de la mafia pour régner sur le crime à New York. Le projet progressait bien jusqu'à ce qu'une affaire de meurtre qu'il avait commandité ne mette à jour son système et l'envoie sur la chaise électrique en 1915.


    Chicago

    Au début du XXe siècle, Chicago, la porte du Far West et la ville des abattoirs, était une ville violente. Gangrenée par la corruption, elle était "réputée" pour ses bars et ses maison de passe. Le premier grand organisateur du crime dans le Grand Chicago s'appelait James Colosimo, surnommé "Big Jim" ou "Diamond Jim", à cause de sa manie d'arborer des diamants sur ses doigts et vêtements. Né en 1877 en Calabre (Italie du Sud), il immigra en 1895 et commenca sa carrière en tant qu'homme de main de conseillers municipaux corrompus. Il se maria en 1902 avec Victoria Moresco, une tenancière de maison close, et devint l'un des plus importants proxénètes du pays. À partir de sa base du Colosimo Cafe, un établissement de luxe, il régnait sur un empire de plus de 200 lupanars.

    En 1909, Colosimo fut menacé par des membres de la Mafia sicilienne, au cours d'une opération d'extorsion de la Mano Nera. Il fit appel au neveu de sa femme, Johnny Torrio, qui appartenait alors au milieu new-yorkais. Ce dernier, après l'avoir aidé à se débarasser de la Mano Nera locale, resta à Chicago, devint son lieutenant, et l'aida à étendre son empire. De là naquirent les futures collaborations entre les "familles" criminelles de New York et Chicago. Mais "Big Jim" Colosimo, après avoir quitté son épouse (pour une jeune chanteuse), ne voulut pas s'impliquer dans le trafic d'alcool lors de la Prohibition, contre l'avis de Torrio, estimant notamment que cette nouvelle activité attirerait trop l'attention des autorités. Colosimo fut assassiné en mai 1920, par un caïd de la mafia de New York nommé Frankie Yale, vraisembablement à l'instigation de Torrio.


    Les années de la Prohibition (1920-1933)

    Au cours de la période de la prohibition de l'alcool aux États-Unis (entre 1920 et 1933), le crime organisé connu un essor sans précédent. L'augmentation fulgurante de ses revenus, sa structuration quasi-industrielle rendu nécessaire par le développement des activités ont façonné le visage de la mafia italo-américaine tel que nous le connaissons aujourd'hui et considérablement accru sa puissance et son influence.


    Le Volstead Act et les bootleggers

    Destruction de barils d'alcool durant la Prohibition.Les abus d'alcool posaient de sérieux problèmes de troubles de l'ordre public, aux États-Unis, comme dans d'autres pays qui ont également adopté la Prohibition (en Finlande de 1919 à 1932, en Norvège de 1916 à 1927, au Canada de 1900/1919 à 1920/1948 selon les provinces). Au début du XXe siècle, le Temperance movement (mouvement pour la tempérance, d'inspiration puritaine) militait aux États-Unis pour une interdiction totale de l'alcool. En 1916, 26 États de la fédération l'avait déjà rendue effective. La Prohibition fut établie au niveau fédéral par le 18e amendement de la Constitution des États-Unis (en janvier 1919), puis par le décret Volstead (Volstead Act en octobre 1919), et prit effet en janvier 1920. Tous les alcools, de la bière au whisky en passant par le vin, furent bannis des bars et restaurants, et les agents fédéraux (agents du fisc puis du bureau de la Prohibition), sous les flash des reporters, montaient de spectaculaires opérations anti-alcool, éventrant les barriques à la hache et répendant leurs contenus dans les caniveaux.

    Bon nombre de citoyens ne souhaitaient pas se passer d'alcool (ne serait-ce que pour le vin de messe dans les églises catholiques ou des cérémonies juives), si bien que les speakeasies (bars clandestins) proliférèrent rapidement, y compris pour la haute société, une source de trafics et de profits illégaux et gigantesques. Cette situation fut une aubaine pour les gangsters, qui s'oganisèrent en groupes de bootleggers (traficant d'alcools) pour satisfaire la demande. Leurs activités s'échelonnaient sur plusieurs niveaux:

    la contrebande, grace à des fournisseurs extérieurs (whisky du Canada, rhum des Caraïbes transitant par la Floride, champagne français transitant par Saint-Pierre-et-Miquelon, etc.), les distilleries clandestines étant plus marginales (la mauvaise qualité de cette production a endommagé la santé de milliers de consommateurs).
    la distribution dans les speakeasies, fréquemment tenus par les mêmes bootleggers.
    les pots-de-vin distribués aux autorités locales (les maires, les policiers, les agents fédéraux).
    et éventuellement l'élimination des groupes rivaux.
    L'impact de la Prohibition sur le crime organisé a été fondamentale, car, d'une part, elle impliquait des profits beaucoup plus importants et la création de groupes mieux organisés, et d'autre part, elle a donné naissance à des carrières criminelles aux rôles prépondérants (voir chapitres suivants): Al Capone, Lucky Luciano, Frank Costello, Meyer Lansky, Bugsy Siegel, Dutch Schultz, Waxey Gordon, etc.


    La guerre des Castellammarese

    La guerre des Castellammarese est le nom donné à la lutte entre deux clans de la Cosa Nostra installée à New York dominant le crime à New York, en 1930 et 1931. Il en a résulté une transformation du paysage criminel nord-américain, l'ordre des mafieux siciliens traditionnels étant remplacé par une nouvelle génération qui allait créer le Syndicat du crime.

    L'un des deux clans était dirigé par Salvatore Maranzano, né en 1868. Ce Sicilien fasciné par Jules César et aux mœurs très traditionelles, avait été envoyé en Amérique en 1918 par le puissant parrain de Castellammare del Golfo (près de Palerme), don Vito Cascio Ferro, dont le projet était de bâtir un empire mafieux transatlantique. Ces projets avaient été contrarié par les poursuites du lieutenant de police Joseph Petrosimo qui le forca à quitter le territoire américain (avant d'être assassiné lors d'une enquête en Sicile en 1909), puis par Mussolini, qui le fit emprisonner en 1929. L'équipe de Maranzano comprenait d'autres transfuges siciliens, tels que Joseph Bonanno et Joseph Profaci, futurs parrains de l'une des cinq familles new-yorkaises. Le clan adverse était celui de Joe Masseria dit the Boss, né en 1879, immigré en 1903 et héritier de la famille Morello en 1920, après une série d'assassinats. Ouverte à des non-Siciliens, son équipe incluait notamment Al Capone, Lucky Luciano, Albert Anastasia, Vito Genovese, Willie Moretti, Joe Adonis, et Frank Costello.


    Joe Masseria [/s]
    Salvatore MaranzanoLa rivalité entre les deux factions était exacerbée, à la fin des années 1920, par de fréquents braquages par l'une, de convois d'alcools destinés à l'autre. La guerre fut déclenchée en février 1930, lorsque Joe Masseria fit exécuter Tom Reina, un caïd qui songeait à faire allégeance à Maranzano, afin de s'emparer de son "entreprise" de racket des livreurs de glace (un commerce important à une époque où les réfrigérateurs n'existaient pas). Les hommes de Tom Reina, dont Gaetano Gagliano et Tommy Lucchese (qui devinrent eux aussi chefs d'une famille new-yorkaise), passèrent dans le camp de Maranzano, après avoir abattu le remplaçant de Reina placé par Masseria, un certain Pinzolo, considéré par les mafieux comme un "guignol". Après plusieurs dizaines de meurtres de part et d'autre sur tout le territoire américain, la jeune génération était effrayée par ce conflit sans issue. Lucky Luciano et Vito Genovese organisèrent le meurtre de leur propre patron, Joe Masseria, dans le restaurant Scarpato à Coney Island, en avril 1931. À la fin d'un repas avec Luciano, Masseria fut abattu par Genovese, Bugsy Siegel, Albert Anastasia et Joe Adonis.

    Fait unique dans l'histoire du crime organisé, Salvatore Maranzano devint alors l'unique chef de la Mafia sicilienne ou Cosa Nostra (ce terme, signifiant "notre chose" serait apparu à cette époque) aux États-Unis. Il prit le titre de capo di tutti capi (chef de tous les chefs), suivant la hiérarchie inspirée des légions romaines en vigueur dans la Mafia en Sicile (chef, sous-chef, capo ou capitaine et soldats). Maranzano était ainsi à la tête d'une armée de 600 soldats sur le territoire des États-Unis. Il nomma les chefs des cinq familles de New York: Lucky Luciano (future famille Genovese), Joe Profaci (future famille Colombo), Gaetano Gagliano (future famille Lucchese), Joseph Bonanno, et Vincent Mangano (future famille Gambino). Cette organisation est toujours en vigueur aujourd'hui.

    Le règne de Maranzano fut bref. Son goût immodéré pour la tradition et son antisémitisme déplaisaient aux jeunes mafieux ambitieux menés par Lucky Luciano, se sentant davantage Américains que Siciliens et souhaitant travailler avec des comparses juifs tels que Meyer Lansky ou Bugsy Siegel. De plus, Luciano avait eu vent du projet de Maranzano de le faire assassiner, lui, ainsi que Vito Genovese et Al Capone, par le tueur à gages irlandais, Vincent "Mad Dog" Coll. En septembre 1931, Lucky Luciano prit donc les devants, avec l'agrément de ses associés, et envoya une équipe de gangsters juifs menée par Bo Weinberg (lieutenant de Dutch Schultz), déguisée en agents du fisc, l'égorger dans son propre bureau. Entre 40 et 90 de ses hommes furent tués le même jour (selon certains spécialistes, cet épisode serait une légende). Cet évênement a été surnommé "les Vêpres siciliennes", en référence au massacre des Angevins en 1282 à Palerme.


    La création de la Commission
    Une fois les vieux don (surnommés Mustache Petes) éliminés, Lucky Luciano et son ami et conseiller Meyer Lansky avaient les mains libres pour imposer leur vision (inspirée par Arnold Rothstein) : le Syndicat national du crime. La base de cette Organisation avait déjà été décidée en mai 1929, à Atlantic City (cité balnéaire du New Jersey), lors d'une grande réunion de gangsters supervisée par Lucky Luciano et Johnny Torrio qui dura six jours. Siciliens, Napolitains, juifs, Irlandais ou Anglais, la plupart étaient bootleggers ou caïds de quartiers de New York ou des principales villes du Nord-Est. Étaient ainsi présents, outre l'organisateur Nucky Johnson, Longie Zwillman (de Long Island), Joe Adonis (Brooklyn), Owney Madden (patron du Cotton Club à Harlem), Willie Moretti (Newark), Al Capone (Chicago), Waxey Gordon (Philadelphie), Moe Dalitz (Cleveland), ainsi que Meyer Lansky, Frank Costello, Bugsy Siegel et Albert Anastasia. Le but de cette manœuvre était le partage des secteurs du crime américain en dehors de l'ordre des vieux don mafieux. La réunion servit également à négocier le partage des territoires et des profits respectifs, une pratique sporadiquement renouvelée par la suite, probablement jusqu'à nos jours.

    Une nouvelle réunion eu lieu à Chicago, après la mort de Maranzano. Il fut convenu qu'aucun chef mafieux ne devait dominer l'ensemble du crime organisé, mais qu'il y aurait une forme de direction collective, tantôt appelé Syndicat nationale du crime ou Commission ou l'Organisation, une mafia moderne ouverte aux non-Siciliens. Les nouvelles règles impliquaient le respect de l'autonomie et du territoire de chaque groupe local ou la recherche de la collaboration plutôt que de l'affrontement, le règlement des litiges importants par le biais des responsables de l'Organisation. Cette organisation devait permettre pour "réguler" collégialement les activités les plus lucratives (jeux, trafics, prostitution, rackets). Par ailleurs, il fut mis en place un système de fonds communs (né de l'association entre Lucky Luciano, Meyer Lansky et Frank Costello) destiné à payer des pots-de-vin aux autorités et à financer les investissements spéciaux.

    À la fin de la Prohibition en 1933, la direction de la Commission, sorte de conseil d'administration du crime organisé, comprenait sept membres permanents (les Big Seven):

    Lucky Luciano, contrôleur de la prostitution, chef de l'ex-famille de Masseria (future Genovese), ayant confié à Vito Genovese la gestion du trafic de stupéfiant.
    Frank Costello, contrôleur des jeux (machines à sous, paris), responsable des opérations de corruption et des liaisons avec les politiciens.
    Meyer Lansky, expert financier de l'Organisation, gestionnaire des fonds communs.
    Bugsy Siegel, surveillant des rackets sur les établissements de nuit et de la distribution de l'alcool.
    Albert Anastasia, contrôleur des docks de New York et du syndicat des dockers.
    Joe Adonis, caïd de Broadway, associé d'Anastasia.
    Louis Lepke Buchalter, racketteur de l'industrie du vêtement, du syndicat des camionneurs, des boulangeries, des cinémas et spécialiste du chantage.
    Dans le même temps, la Commission mettait en place une branche chargée de l'exécution, après délibération des chefs mafieux, des membres du crime organisé coupables de manquements ou considérés comme non fiables. Connue sous le nom de Murder Incorporated, cette équipe de tueurs opérationnelle sur tout le territoire américain fut dirigée par Lepke Buchalter, avec l'aide d'Albert Anastasia et Bugsy Siegel. Elle fut démasquée en 1940.

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